Au premier jour de son procès à Brest (29), le capitaine turc du TK Bremen, qui s'était échoué fin 2011 sur une plage bretonne, a assuré mercredi n'avoir pas commis de faute. Seul mis en cause, il avait décidé de quitter le port de Lorient alors que les prévisions météorologiques étaient mauvaises.
Le capitaine turc du TK Bremen, qui s'était échoué fin 2011 sur une plage bretonne, seul mis en cause dans cette affaire, a assuré mercredi n'avoir pas commis de faute lors de la première journée du procès qui se tient jusqu'à vendredi à Brest (Finistère).
Il appareille malgré la tempête annoncée
La décision du commandant Rifat Tahmaz, 55 ans aujourd'hui, de quitter le port de Lorient le 15 décembre 2011, alors que les bulletins météorologiques faisaient état de mauvaises conditions à venir ont été au centre des échanges dans la matinée.
Assisté d'une traductrice, Rifat Tahmaz a acquiescé à la barre du tribunal correctionnel à la question de la présidente Audrey Berrier de savoir s'il réitérait ses propos tenus lors d'auditions précédentes selon lesquels à son sens il n'avait "jamais commis de faute de navigation".
Il a en outre assuré que s'il avait su qu'il pouvait rester encore une nuit à quai, il n'aurait pas pris la décision de lever l'ancre ce matin-là.
"Je ne peux pas m'opposer à la volonté d'un capitaine d'appareiller"
"Je n'ai pas senti en lui une envie de rester donc je n'ai pas fait passer l'information", selon laquelle il pouvait rester à Lorient, a témoigné l'agent consignataire chargé à l'époque d'assister l'armateur du cargo. "Je ne peux pas m'opposer à la volonté d'un capitaine d'appareiller", s'est justifié de son côté le commandant du port de Lorient de l'époque Éric Roellinger.
Il demande l'aide d'un remorqueur
Battant pavillon maltais, le cargo de 109 mètres de long avait quitté Lorient le 15 décembre à 11H00, alors que la tempête Joachim était annoncée.
Alerté par le pilote du port lors de la manoeuvre de départ des très mauvaises conditions météorologiques à venir, le capitaine du TK Bremen avait alors décidé de se mettre au mouillage à l'abri de l'île de Groix. Mais dans la soirée, il avait commencé à dériver alors que les vents forcissaient. "J'ai sans arrêt demandé un remorqueur mais on ne me répondait pas", a assuré Rifat Tahmaz à la barre par l'intermédiaire de sa traductrice.
Mais le directeur adjoint du Cross Etel de l'époque, Antoine Ferry, de permanence ce soir-là, a dit à la barre avoir eu l'intime conviction dès le départ qu'aucun remorqueur ne pourrait lui porter secours, en raison des mauvaises conditions de mer, ainsi que du délais pour le mettre en oeuvre.
Démantelé sur place
Le TK Bremen avait fini par s'échouer à 02H00 du matin sur la plage d'Erdeven, dans le Morbihan, dans une réserve naturelle à l'embouchure de la ria d'Etel, sans faire de victime et en créant une pollution relativement restreinte.
Trop endommagé pour être réparé, le navire avait été démantelé en janvier sur le lieu du naufrage.
En avril 2012, le BEA Mer avait conclu que l'échouement du cargo résultait du mauvais temps, ainsi que d'une mauvaise gestion du mouillage par son commandant.
Rifat Tahmaz comparaît pour "pollution des eaux territoriales par faute caractérisée ou violation manifestement délibérée d'obligation de sécurité ou de prudence".
Sept ans d'emprisonnement
Il risque, selon le code de l'environnement, jusqu'à sept ans d'emprisonnement et 10,5 millions d'euros d'amende.
Parmi les nombreuses parties civiles dans ce procès, les associations France nature environnement, Bretagne vivante, le syndicat mixte de protection du littoral breton Vigipol ou encore Robin des Bois, qui a décidé "symboliquement" de ne pas assister au procès prévu pour durer deux ou trois jours.
"Encore un procès pour rien"
"Ce sera encore un procès pour rien", a expliqué à l'AFP Jacky Bonnemains, à la tête de Robin des Bois, regrettant que seul le commandant soit mis en cause dans cette affaire. C'est "le fusible idéal dont le court-circuit permet de laisser dans l'ombre les négligences ou les fautes caractérisées des autres parties prenantes", explique l'association, qui met en cause "toute la filière d'accueil, d'encadrement, de classification, d'inspection, de coordination des navires entrant dans le port de Lorient ou en sortant".